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Le blog de Jean TAILLARDAT - Page 10

  • Un chef de guerre

                                                                      Brazzaville, le 3 janvier 2016

     

    Cher lecteur,

     

    Je suis de retour avec quelque retard du périple imposé par mon journal… « Explorer les îles des réfugiés et des exilés ». Hélas, et c’est la raison de mon retard, je n’ai pas réussi à rencontrer le moindre soi-disant exilé. En revanche, j’ai approché nombre de leurs représentants, ma foi fort bien vêtus, ayant limousine et chauffeur. C’est ainsi que j’ai appris, cher lecteur, la dure réalité : ce sont les fortunes qui sont exilées, mais par les fortunés… On apprend à tout âge.

     

    Je suis revenu à temps pour assister à la deuxième conférence télévisuelle de notre monarque républicain, Frolanda 1er. Eh bien, je ne l’ai pas reconnu. La victoire obtenue sur les Sauvages en Namibie doit y être pour quelque chose, Frolanda est devenu CHEF DE GUERRE. Il l’a dit, il l’a répété, son gouvernement est en ordre de bataille. Et surtout nous avons appris, cher lecteur, qu’il avait une… une boîte à outils ! que, grâce à elle et pour peu que nous sachions patienter, il allait nous bricoler un bon petit redressement national, malgré tous les obstacles que des Dieux hostiles s’obstinent à lui mettre dans les roues à grands coups de bâtons.

     

    Cher lecteur, je vous avoue franchement que je n’ai pas apprécié vos réactions. Notre Président n’a fait que répéter les soixante propositions de sa campagne ! Hier, vous votiez pour lui, aujourd’hui vous le rejetez, à 66 %. Le peuple est pusillanime !

     

    Il est vrai que des premières lois votées, la première a été retoquée par le CSDC[1], la deuxième a mis plus d’un million de personnes dans la rue, aucune des deux n’apportant quoi que ce soit de plus pour personne d’ailleurs.

     

    Notre Président a de la suite dans les idées, il faut le reconnaître - certes ses opposants les plus mollassons disent qu’il est entêté, les gauchistes qu’il est têtu, les sociologues qu’il est borné, les psychologues qu’il est psychorigide, la presse étrangère qu’il est pathétique. Non, rien  de tout cela ; il est droit dans ses bottes, fier, il est notre Président à tous !

     

    Et c’est un brave homme. En cette semaine sainte, il a accepté de porter la croix de toutes nos inconséquences, de toutes nos turpitudes. Il chute, une fois, deux fois, trois fois et trouve encore la force de se relever. Étendant ses bras en croix, il protège ses petits, ses ministres, ses amis, jusqu’à Niquette Parpaing, notre brave ministresse du commerce extérieur qui souffre de ne rien connaître au commerce et de pas parler espéranto ! Mais ne lui jetez pas la première pierre : elle n’est pas seule responsable du déficit colossal de la balance commerciale. Plus même, comme elle n’y connaît rien, elle s’abstiendrait intelligemment, dit la rumeur, de toute décision ? C’est la vraie vérité.

     

    Mais, me direz-vous, une personne de premier plan a disparu du paysage médiatique… Mme Croq’mitaine ! Après avoir arraché Frolanda des bras de la mère de ses enfants, après avoir fêté à grands coups de « french kisses » sa victoire, la première dame est extrêmement déçue. Elle voulait une part de la gloire de son concubin, pas de sa déchéance ! Elle récolte moqueries et sarcasmes. Il paraît, de source anonyme, qu’elle cherche un autre cheval…

     

    D’autres ont disparu : Couillon et Flippé… alors qu’Achille Talon éructe et que Moussa Razé exulte.

     

    Cher lecteur, je vous conseille de vous diriger discrètement vers les canots de sauvetage… ou de « vous bouger le c… » ! comme on dit chez nous, pour concourir au renflouement du navire Congo. De mon côté, je me vois contraint de mener une nouvelle enquête, en Patagonie cette fois-ci, pour étudier de plus près les pingouins. Mais je reste proche de vous, cher lecteur.

     

    Votre correspondant à Brazzaville : Charles-Georges-Valéry-François-Jacques-Nicolas du Pont Branlant

     



    [1] CSDC : Conseil Supérieur de la Défense de la Constitution

  • Deuxième lettre au Président

     

                                                        Pétaouchnok, nonidi, 9 germinal an 221


    Monsieur le Président,

     

                 Je m’en veux terriblement de vous avoir envoyé ma lettre si tardivement que vous n’avez pas pu l’exploiter et avez si calamiteusement raté votre conférence télévisée.

     

    Vous m’avez dit que ce n’était pas de votre faute, que vous aviez pris soin de consulter les esprits les plus fins de votre entourage et que vous vous rendiez à l’évidence : les courtisans ne sont pas de bon conseil !

     

    Vous m’avez dit que vous regrettiez votre totale méconnaissance de l’entreprise et que vous veniez de découvrir que ce sont elles qui sont créatrices de richesse, qu’il y avait une différence irréductible entre vivre des taxes ponctionnées sur les citoyens et vivre des recettes obtenues en vendant des biens et des services ;

     

    Vous avez bien essayé de l’expliquer à M. Daniel Poujadasse mais avec une telle réserve, un tel manque de conviction que vos auditeurs ont bien compris votre dilemme : vous renier ou dénier la réalité !

     

    Et puis, vous aviez appris la veille de votre intervention que le déficit de l’État pour l’an 220 était de 4,8 % du PIB, faisant grimper la dette à 90 % du même PIB ! Il y avait de quoi être perturbé, le coup est rude : comment ? La réalité ne se plie pas aux dogmes ! Du coup vous reprochez à vos excellents professeurs de l’ENAE de ne pas vous avoir enseigné l’histoire, par exemple celle de l’écroulement de l’Empire Soviétique : la mort de l’initiative individuelle, la chape de plomb mise par l’État sur les forces vives du pays. Vous venez de comprendre cette parole forte : « La France est le dernier pays communiste au monde », avec la Corée du Nord, avez-vous ajouté. Vos yeux se sont décillés : « Bon sang, c’est donc pour cela que la Chine a libéralisé son économie ! » Certes, il y a des effets pervers : injustice, pollution, mais globalement les Chinois s’enrichissent et le chômage diminue. N’est-ce pas ce que le bon peuple veut ?

     

    Monsieur le Président, mon cher Napoléon ; vous me demandez de vous conseiller en secret pour sortir la France de la zone rouge – de la zone de relégation, m’avez-vous dit exactement – et pour préparer votre prochaine intervention à l’occasion du 1er anniversaire de votre règne – Vous espérez que ce ne sera pas le dernier mais n’en êtes plus si sûr. Entre ces deux futurs : être contraint à démissionner – avant que le peuple ne réclame votre tête – pour laisser la place à votre opposant de droite haï (à cette idée, votre visage se crispe, la sueur couvre votre corps et trempe le col de votre chemise) ; ou bien appliquer un amitieux programme de redressement national, à l’allemande… (recevoir des félicitations du Kayser vous file des boutons, être brocardé par vos ex-amis socialo-bureaucrates aussi) mais la perspective d’être réélu en l’an 225 fait passer la pilule.

     

    Allons, courage, monsieur le Président, vous sortirez grandi par l’épreuve du pouvoir et je serai fier d’avoir permis l’émergence du Discours d’un Monarque. Dommage que nous ayons perdu un an, le temps de votre formation accélérée !

     

    Recevez, mon cher Président, l’expression intéressée de ma haute considération et de mon admiration sans borne.

     

    Votre très dévoué,
    Talleyrand

  • Première lettre au Président

                                                         Pétaouchnok, octudi, 8 germinal an 221

     

     

     

    Monsieur le Président,

     

              Je ne voudrais pas être à votre place ce soir pour votre conférence ! Vous me direz : « Je voulais être Président de la République française, c’est fait, le reste a moins d’importance, même si ma position est inconfortable », mais vous êtes comme tout humain, vous préférez être apprécié… Or, vous ne l’êtes pas. Et vous ne voulez pas mettre la main socialiste sur un pays moribond, malgré tout !

     

    Vous ne saviez pas, vous qui n’aviez jamais eu de poste à responsabilité nationale, vous ignoriez la réalité de la situation de notre pays, de l’Europe. Et puis, il est facile de ne pas voir, cela permet de crier haro sur le baudet sans trop d’état d’âme. Soit, maintenant, vous êtes au pied du mur, ou pas loin. Les Français ont voté pour vous non pas pour que vous appliquiez des propositions mais parce qu’ils vous ont fait confiance pour améliorer leur sort.

     

    Homme de consensus, dit-on de vous, ne prenant pas les problèmes de front, toujours en tergiversations, en détournements, en manipulations. Holà ! il vous faut bien faire face, à un moment ou à un autre. Et il ne suffira pas d’expliquer pourquoi le pays s’enfonce dans la crise. Il vous faut prendre le leadership et rassembler sur un programme de redressement national ; je fais l’hypothèse que vous ne le ferez pas, pas encore, c’est trop hors de votre caractère. Dans un an ou deux peut-être, quand le pays sera exsangue, si vous ne démissionnez pas avant…

     

    Je ne voudrais donc pas être à votre place avec votre tempérament, mais, à mon corps et à ma santé défendant, je prendrais bien votre place pour haranguer nos concitoyens, leur tenir un langage de vérité et les engager, tous, dans une lutte acharnée, leur dire que nous avons besoin de toutes les forces et toutes les ressources pour sortir d’une situation alarmante, sinon catastrophique.

     

    Aux armes, citoyens ! Tous aux armes, apporteurs de capitaux, financiers, dirigeants, cadres, techniciens et employés, professions libérales, artisans, paysans, fonctionnaires, pour remporter la lutte contre le chômage. Parce que laisser tant d’hommes et des femmes, de jeunes au bord de la route est une calamité nationale.

     

    Citoyens, il va falloir d’abord tous se serrer la ceinture et vos élus vont montrer l’exemple en diminuant leurs soldes, salaires, émoluments, frais, etc. de 20 %, en ne conservant qu’un seul traitement s’ils ont plusieurs mandats.

     

    Les fonctionnaires vont faire l’effort d’accepter une diminution de leurs salaires de 10 %. Ils vont accepter que leurs pensions de retraite soient alignées avec celles du privé. Grâce aux techniques modernes de traitement de l’information, ils vont accepter d’accroître leur productivité de 20 %, permettant ainsi de diminuer leur nombre et la charge qu’ils représentent pour le pays.


    Les dirigeants et hauts fonctionnaires vont accepter une amputation de leurs rémunérations globales de 20 %.

     

    Vous allez agir pour réduire de 50 % le coût de l’administration européenne, et les rétributions extravagantes des élus.

     

    Citoyens, il va ensuite falloir restructurer l’administration du pays, très rapidement, autour de grandes régions, au nombre de douze. Les tâches dévolues aux départements sont partagées entre les régions et les Communautés de communes et d’agglomérations et les départements, héritages de l’époque napoléonienne, seront remisés dans les musées de l’histoire.

     

    Citoyens, nous allons parallèlement venir au soutien des plus pauvres. Personne en France, dès le mois de septembre 2013, ne vivra avec moins de 800 euros par mois et aucune famille avec moins de 1200 euros.

     

    Citoyens, nous allons libérer les énergies. Notre pays est riche, riche de ses compétences, de ses ressources, de ses infrastructures. Pour cela, nous allons soutenir les entrepreneurs, administrativement et financièrement, en favorisant l’investissement privé, en encourageant les « business angels », les sociétés d’investissement et en leur permettant de rémunérer le risque qu’ils prennent. Les organismes d’État comme la BPI seront au service de ces sociétés, l’administration sera au service des entrepreneurs et des entreprises.

     

    Par ailleurs, les charges qui pèsent sur les entreprises seront allégées de trois points dès le 1er janvier 2014. La TVA sera portée à 21,6 et les 2 points consacrés à financer prioritairement les caisses de la sécurité sociale et la retraite.

     

    Enfin, les transactions financières seront taxées à 0,1 %, les ressources ainsi mobilisées étant immédiatement réinvesties dans les infrastructures et le soutien à la recherche

     

    Citoyens, nous allons redonner à l’école de la République sa force et son rôle primordial dans le redressement du pays, en accordant aux Chefs d’établissement la responsabilité du recrutement, du management des professeurs et de l’animation du corps professoral, en facilitant le recrutement d’enseignants compétents et motivés par des rémunérations plus attractives. Elles seront réévaluées de 10 % par an pendant cinq ans.

     

    Citoyens, nous allons mettre en œuvre les moyens d’intégrer les personnes qui se sont installés en France ou qui vont le faire, en exigeant un niveau de langue française nécessaire et suffisant pour travailler et en créant les structures de formation linguistiques adéquates. Le droit de vote pour les élections locales sera donné aux personnes justifiant de cinq ans de présence en France et désirant devenir françaises.

     

    Citoyens, nous allons intervenir dans les zones sensibles pour sortir les jeunes de la spirale infernale du chômage, en créant des Centres d’Aides par le Travail à l’instar de ce qui existe pour les personnes en difficulté. Les communes recevront les aides financières pour mettre en place les structures d’encadrement des jeunes en lien avec leurs parents. Les forces de police seront chargées de prévenir et, dès que nécessaire, d’éradiquer les comportements délictueux. Les récidivistes seront mis sous contrôle étroit.

     

    Citoyens, je vous demande de soutenir l’action de mon gouvernement pour redresser le pays. Mais nous n’en resterons pas là. Nous allons construire l’Europe de demain.

     

    Citoyens, nous sommes européens. Nos moyens de Défense Nationale seront intégrés dans la Défense européenne, et nous allons mobiliser tous les membres de la communauté européenne pour créer une Europe de la Défense. Et comme il ne peut y avoir d’Europe de la Défense sans politique européenne, nous allons œuvrer pour la création des Etats-Unis d’Europe.

     

    Citoyens, le monde dans lequel nous voulons vivre est un monde d’équilibre et de justice. Dès que les finances du pays le permettront, que notre balance commerciale sera bénéficiaire et, quoi qu’il en soit, dès aujourd’hui, nous préparons ce monde fait par les hommes pour les hommes : écologique et humain, utilisant les techniques informationnelles et les ressources renouvelables, au premier rang desquelles l’intelligence humaine.

     

    Citoyens, nous n’avons pas le choix, nous sommes au pied du mur. Soit nous œuvrons tous ensemble, avec justice, soit nous sombrons tous ensemble. Françaises et Français, je vous appelle solennellement à vous rassembler pour le renouveau de l’Europe et son rayonnement dans le monde.